Bull Gamma M-40
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Histoire Informatique
mise jour
06 dc. 2006
Le titre de cette page mrite quelques commentaires. Aprs l'chec commercial du Gamma 60, les tudes de la Compagnie des Machines Bull se concentraient sur les matriels de bas de gamme : la tabulatrice lectronique du Gamma 10 et les recherches pour une petite machine. Pierre Davous la tte d'une division de recherche en informatique d'Automatisme (la Division 8) estimait que la compagnie ne pouvait tre indiffrente aux ordinateurs plus puissants et applicables tous les marchs (y compris les marchs scientifiques et de process control). Cette cible avait t au cours des annes 1950 vise, puis un peu dlaisse par la SEA, mais elle conservait un certain attrait pour la DRME (direction des Recherches militaires) et plus gnralement pour les instances gouvernementales, dont l'appui tait indispensable la poursuite d'un dveloppement indpendant de la Compagnie des Machines Bull. C'est ainsi que naquit le projet au nom de code M-40, auquel j'ai marginalement contribu pour l'analyse des applications temps rel et leur solution l'aide d'une machine moyenne.
La conception du projet tait l'uvre de Georges Lepicard (ingnieur de SupAro ayant pass quelques annes la CAE). Georges avait tudi la CAE le RW-530 et, Bull, il prit connaissance des spcifications de l'ordinateur de process control RCA 110. Ces deux machines se prsentaient sur le mme march que celui que visait la M-40. Bull avait envisag en 1962 la commercialisation du RCA 110, mais la distension des liens avec RCA et la concurrence avec la CAE n'a pas permis l'importation de cette machine.
Le projet M-49 prit forme au cours de 1963 et fut prsent aux organismes publics. Peut-tre parce qu' il s'agissait d'une machine "mot" et d'une machine temps rel (interruptions de programme) il ne retint pas srieusement l'attention de ceux qu'on n'appelait pas encore les "product planners" pour des applications de gestion pour lesquelles l'offre Bull de machines moyennes et grosses tait du domaine des importations et de la fabrication sous licence de RCA. Cependant, le prototype de la M-40 fut prsent au SICOB de 1963 sous la forme d'une machine scientifique.
La machine tait une machine mot de 24-bits avec une mmoire tores de 8 32 K mots. Une de ses particularits tait que l'excution des instructions se faisait sous contrle de microprogrammes enregistr dans une mmoire ROM btonnets (galement utilise dans le projet petite machine), ce qui lui donnait un code d'instructions trs riche sans grever le cot de fabrication. Les entres sorties taient sous contrle de programmes prioritaires la manire des mini-ordinateurs. Cependant, un systme de "canaux simultans" (c'est dire en ralit un contrleur DMA) fut ralis par la suite pour supporter des priphriques rapides en simultanit. Ce systme de canaux fut ralis par Jacques Bienvenu.
Juste avant le SICOB, la machine fut en hte baptise Gamma M-40 sans altrer le nom de code (ce qui a provoqu des confusions dans le rseau commercial avec le Gamma 40 -nom donn par Bull au projet RCA 3301 qui sera annonc et retir avant toute livraison).
Un contrat important de gestion de processus fut conclu pour la raffinerie de Feyzin o une quipe de la Division 8 entreprit le dmarrage et la ralisation des quipements d'interface avec instruments de mesure et relais de commande.
Par ailleurs, une quipe de dveloppeurs de logiciel dirige par Franois Sall (avec notamment Claude Chemla et Jacques Newey) entreprirent la ralisation d'un superviseur standard et d'un moniteur pour les applications scientifiques. Un compilateur FORTRAN inspir de celui de l'IBM 7040 fut ralis ainsi qu'un langage scientifique interactif original le LSA (dvelopp par Andr Bensoussan et Mike Spier). Un systme time-sharing pouvant recevoir une dizaine de consoles LSA (avec des terminaux IBM Slectric boule) fut ralis en 1965 sur la M-40. Le time-sharing LSA utilisait le tambour comme mmoire secondaire de swapping. Il ne fut utilis, ma connaissance, qu' l'universit de Lille. Il avait l'inconvnient par rapport au GE-265 de ne pas supporter des lignes de communications distance, mais seulement des terminaux locaux.
La M-40 reut de nombreux dispositifs, entirement conus par la Division Automatisme de Bull-GE, destins au process control dans le cadre du contrat d'automatisation de la raffinerie Elf de Feyzin.
En mars 1964, intervint l'absorption de la
Compagnie Bull par General Electric et le sort de la M-40 fut remis en question.
Cette machine mordait sur les machines GEPAC du dpartement process control de
GE, mais dont les rapports avec le Computer Department taient
sensiblement distendus.
Par son organisation mots de 24-bits la M-40 pouvait
menacer la srie standard GE-400, sur laquelle elle avait un avantage de cot
de revient, mais avait un retard sensible du point de vue des programmes de
gestion. En "tlgestion", elle se heurtait la combinaison
GE-400/Datanet-30. Un compromis fut trouv l'intrieur de Bull-GE en
laissant vivre le M-40 dans les applications o elle avait t introduite
(automatisme et petits centres scientifiques). Un aperu
des problmes politiques de cette poque a t dcrit en septembre 2004 par
Pierre Davous.
Les quipes M-40 furent
rapidement reconverties dans la reprise du projet de GE-140, avant de se
retrouver pour l'essentiel en 1967 dans les avant-projets de Nouvelle Ligne de
GE.
Une dizaine d'exemplaires de la M-40 fut vendue en France. Les organismes gouvernementaux qui avaient soutenu le projet y taient devenus hostiles partir de la prise de contrle de Bull par General Electric et dirigrent les commandes publiques vers les matriels SDS vendus par la CAE puis la CII.